Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
gabuzomeuh
20 juillet 2007

Silencio 2

D'aussi loin que je me souvienne, ma mère est malade.
Je ne l'ai jamais connue que comme ca.
Petit, cela ne me dérangeais pas. J'étais jeune et mon monde se limitait à peu de choses, mes parents en étaient le centre et le reste n'avait pas encore de réalité tangible.
Et puis, mon regard s'est ouvert, mon horizon s'est élargi. J'ai découvert les gens, j'ai découvert leur regard. J'ai découvert le poids de la différence. Je me suis découvert une tristesse sans fond et une haine qui l'était tout autant.
J'avais 8 ans.
Bien trop jeune pour ce genre d'émotions, bien trop jeune pour pouvoir l'accepter, le prendre avec recul et,
plus encore, le vivre bien.
Je me suis construit par la distance, par l'intellectualisation. L'autre, cet autre qui m'a mélancolisé, qui m'a lacéré à un âge où j'aurais du être dans l'insouciance enfantine... comment lui faire confiance, comment accepter de partager avec lui, d'être dans l'émotion, de me laisser aller? Comment lui faire confiance?
J'ai méprisé tous ces petits barbares débiles
 insensibles, insipides et minables qui couraient en culottes courtes derrière un ballon dans les cours de récréation. Et j'ai continué à les mépriser beaucoup plus tard encore alors qu'ils étaient déjà devenus des banquiers, des juges, des dealers, des épiciers, des fonctionnaires, des proxénètes, des évêques ou des chimpanzés névropathes.
Des années durant, je me suis auto-détruit pour ne plus me voir, pour ne plus les voir, pour ne plus voir combien j'avais besoin d'eux, combien ils m'empêchaient d'aimer ceux que j'avais choisis. J'ai maudit ce monde et préféré les limbes à la lutte. J'ai rationalisé, intellectualisé, cartésianisé là où j'aurais dû laplaciser plutot, vivre certainement. Mais comment faire confiance?
Il n'y a pas de réponse je crois. Question enfantée par la peur pour suciter l'immobilisme. Oxymoron mêlant rationnel et sensitif.
Il y a longtemps que j'ai quitté ma rive. Le léthé n'a rien effacé. La traversée des 4 fleuves n'est pas sans douleur. La peur est toujours là, mais ramenée à sa fonction première, provoquer une réaction. J'avance avec la sérénité de qui s'est
trop vu mourir pour avoir encore réellement peur et pour ne pas savoir comment faire. Les autres, leurs regards me blessent encore... mais, Harry, écoute, écoute, le rire des Immortels se rapproche.
Seulement pour les fous.

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Moi, j'ai méchamment le sentiment de ne pas réussir à saisir mes sentiments, à ne pas réussir à les exprimer par des mots. J'essaye, mais ils me glissent entre les doigts et les mots truovés ne me sied jamais vraiment. Sans doute faut il aussi bcp pratiquer pour réussir à le faire correctement.
L
Je ne traîne pas les mêmes croix. D'autres. Comme tu dis, c'est le lot de tout le monde. Mais ce que j'aime dans ton écriture, c'est qu'elle donne corps à des sentiments, des choses que l'on perçoit sans trop savoir comment les définir. Le fait de mettre des mots précis dessus me saisit à chaque fois, par la justesse avec laquelle c'est fait. Enfin c'est mon avis...
S
Ca fait toujours plaisir à lire<br /> Mais je ne suis pas sur que te retrouver là dedans soit très bon signe pour toi...<br /> En même temps, on traine tous nos croix. Reste à vouloir les voir, chez soi comme chez les autres.
L
Bin... ça faisait un moment que je n'étais pas venue faire un tour (je bosse je bosse, et pour pas un rond en plus! *** de fonction publique!), et paf je tombe là-dessus : Silencio 2...et c'est toujours la même claque : des mots précis, vifs, presque tranchants, qui dessinent ce qu'on ressent. Encore une fois, bravo...
S
En revanche, toujours aucune trace de cerveau chez aaaline
gabuzomeuh
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité