A bittersweet life
Kim the dog.
Il
est des films qui laissent une trace, dont le souvenir ne s'efface pas.
Une incompréhension rémanente, le sentiment d'avoir été touché mais de
ne pas comprendre en quoi, de ne pas en saisir toute l'étendue.
Kim
est gérant d'hôtel. Jeune, beau, la classe, efficace, le bras armé d'un
chef de gang, il ne laisse rien passer et est aussi expéditif
qu'insensible et froid. Un chien de combat en costard et charisme.
Aucune émotion, aucune sensibilité, aucun remord. Aucune question ne
vient ébranler son petit monde, une ligne droite jusqu'à une fin
certaine, par un chien de combat plus féroce et efficace que lui.
U-turn...
Prière de ne pas nourrir les animaux.
Kim
est chargé par son boss de surveiller sa jeune maîtresse qu'il
soupsonne d'avoir une liaison, et dans l'affirmative, de s'occuper des
2 tourtereaux. Le moment venu, Kim ne peut s'y résoudre, le beau tueur
implacable doute. Il lui est impossible de tuer ce qu'elle a éveillé
chez lui, ce supplément d'âme qu'il s'est découvert. Enfin, il écoute,
il parle, il sourit, il sort de ses schémas prédéterminés. Enfin, qqch
l'empêche de dormir.
Pareil
manque d'obéissance mérite punition, il faut bien faire comprendre à son
chien qui est le maître. Kim est donc affectueusement mollesté et
enterré vivant.
L'armée des morts
Kim sort du trou. La vengeance peut commencer.
A bittersweet film; un film aigre-doux.
Cela
faisait bien longtemps qu'un film ne m'avait pas paru si en phase avec
son sujet, avec son titre. Le dernier à ce point était The Barber des
frères Coen. L'homme qui n'était pas là (oui je jette des ponts énormes
entre des films totalement différents et super éloignés, on me l'a déjà
dit, et je prends ca comme un compliment). A bittersweet life est
aigre-doux, il distille et mélange le contemplatif, le calme, le doux
et une violence sèche et brutale, un rythme alangui et une frénésie
morbide, le sérieux et l'humour le plus badin et le plus crétin.
Toujours cette école du cinéma Coréen. Je suis fan, vraiment. Cette
science de la lumière, de l'émotion profonde et kitschisée, de la
violence magnifiée et élevée au rang d'art. Comme si rien n'avait de
sens en soi, sauf celui qu'on lui donne. Tout peut être détourné, tout
peut exprimer un chose et son contraire. Dans la lucarne de Kim
Jee-Woon, les combats se font réglements de compte, fusillades kitsh et
ridicules parfois, ballets hallucinants de beauté morbide et de
légèreté perverse et enragée. L'avenir du cinéma se construit à l'est,
définitivement, suffit de regarder les Infiltrés de Scorcese et ses 4
statuettes oscarisantes et de le comparer à l'original Infernal
Affairs.
Il
y a du petit prince dans ce film, dans ce mouvement d'apprivoisement du
chien. Mais un chien de combat reste un chien de combat et sa réponse à
toute sera toujours la violence, peut importe ce qui la motive.
Et
puis cette sensation que tout est faux. Kim sort de son trou comme un
mort vivant, comme une ame en peine en quête de vengeance et qui ne
trouvera le repos qu'une fois celle ci réalisée. Les dernières images
modifient encore
l'angle de vision: tout ca est faux, bien sur, il ne s'agit que de
divagations de Kim, de son cerveau, de ce qui aurait pu arriver si il
avait changé de comportement, si finalement, cette rencontre avait
vraiment changé qqch en lui. Un possible. Face à son reflet, il joue un
role, il rêve éveillé. On l'imagine retourner s'occuper des clients
difficiles. On l'imagine imaginant ce qu'aurait pu être sa vie si il
avait accepté de ressentir qqch. On imagine les 2 tourtereaux vivants
leur amour une balle dans la tête. On n'en sait rien. On ne sait plus quelle a été la réalité du film. Et c'est tellement mieux comme ca.
Comment ca c'est décousu?
Oui et alors?